Le sable, les sels fondus et le béton pourraient-ils retenir la clé pour exploiter et réaffecter la chaleur produite par les réacteurs nucléaires?
Dans le cadre de la première phase de l’Initiative DIREP (Démonstration, d’Innovation et de Recherche sur l’énergie propre) des Laboratoires nucléaires canadiens (LNC), une équipe de scientifiques explore comment les batteries thermiques pourraient se connecter à un système d’énergie nucléaire hybride renouvelable.
Les batteries thermiques, aussi appelées systèmes de stockage d’énergie thermique, stockent l’excès de chaleur produit lorsque la demande est faible, puis la libèrent dans le réseau pour l’utiliser lorsque la demande est élevée.
Utilisés à l’échelle internationale dans le secteur de l’énergie depuis plus d’une décennie maintenant, ces systèmes peuvent égaliser une partie de la nature ascendante et descendante des demandes énergétiques, réduire le coût de l’énergie en récoltant ce qui est produit pendant les périodes moins coûteuses de la journée, réduire les émissions de CO2 et, dans l’ensemble, contribuer à une alimentation énergétique plus flexible et plus fiable.
Mais comment les systèmes de stockage d’énergie thermique interagiraient-ils avec un système d’énergie nucléaire hybride?
« L’énergie nucléaire, en plus de soutenir les efforts du Canada visant à augmenter l’approvisionnement en électricité, offre également une alimentation en chaleur à faible teneur en carbone qui peut être utilisée pour les processus industriels ou commerciaux exigeants en chaleur, comme la production d’hydrogène ou de carburant synthétique, par exemple, ou même le chauffage urbain », explique Travis Pettigrew, responsable technique de l’initiative DIREP.
« Le stockage d’énergie thermique pourrait être la clé pour utiliser directement cette chaleur générée par les réactions de fission qui se produisent à l’intérieur des réacteurs nucléaires. Les systèmes de stockage pourraient agir comme intermédiaire entre une centrale nucléaire et les systèmes commerciaux ou industriels qui nécessitent cette chaleur. »
Plus largement, les systèmes d’énergie hybrides (SEH), qui sont composés de plusieurs sources d’énergie et systèmes de stockage, offrent une approche propre et fiable capable de répondre aux demandes accrues d’électricité et de chauffage, car notre objectif est de se fier de moins en moins aux sources d’énergie émettant du carbone.
Imaginez un réacteur nucléaire, des panneaux solaires, des éoliennes et des batteries de stockage qui travaillent tous ensemble pour répondre aux exigences énergétiques du transport, de l’électricité, ainsi que du chauffage et de la climatisation, pour les applications résidentielles, commerciales et industrielles.
Lorsque chaque source est combinée aux autres, elle peut jouer un rôle à sa mesure et augmenter la fiabilité globale de l’alimentation en énergie. Par exemple, un système de stockage pourrait contribuer à l’approvisionnement lorsque certaines technologies génératrices d’énergie ne sont pas disponibles. Par contre, ces technologies pourraient recharger le système de stockage lorsqu’elles génèrent plus d’énergie que ce qui est nécessaire.
« Les communautés éloignées et nordiques pourraient grandement tirer profit des systèmes énergétiques hybrides, car elles sont souvent aux prises avec des systèmes électriques à coût élevé et de faible fiabilité. Ces régions ont également tendance à subir les plus grands impacts du changement climatique en raison de l’utilisation de combustibles fossiles », déclare M. Pettigrew.
« Pouvoir accéder à une énergie plus abordable et plus fiable pourrait bénéficier à ces communautés par l’apport de nouveaux développements qui amélioreraient leur qualité de vie et leur économie locale, comme la production alimentaire locale, l’accès à l’eau potable et le développement industriel », ajoute-t-il.
Dans un système d’énergie hybride nucléaire, en particulier, les batteries thermiques pourraient capter et stocker la chaleur produite par les réactions de fission qui se produisent à l’intérieur d’un réacteur nucléaire. Cette chaleur pourrait ensuite être utilisée pour des applications de chauffage résidentiel, commercial ou industriel, comme le dessalement et le traitement de l’eau, le chauffage de serres pour favoriser l’agriculture dans des environnements froids ou simplement le chauffage des maisons.
Trois expériences contribuent à ce projet de recherche pluriannuel sur le stockage de l’énergie thermique, qui est l’un des nombreux projets en cours dans la première phase de l’initiative de DIREP – Laboratoires DIREP.
Au cours de cette première phase, les LNC se concentrent sur la modélisation et les simulations, les démonstrations à l’échelle du banc d’essai, l’intégration des technologies d’énergie propre et l’optimisation des technologies déployées, en s’efforçant en fin de compte de comprendre le rôle de chaque technologie propre pour soutenir la carboneutralité.
La deuxième phase, le Parc DIREP, se concentrera sur l’infrastructure énergétique hybride, le passage de la modélisation et du travail au banc d’essai en démonstrations à plus grande échelle, afin de démontrer l’évolutivité des technologies, prouver que l’exploitation de systèmes d’énergie propre peut générer des données économiques et de performance, et de démontrer la capacité d’homologation de systèmes d’énergie propre étroitement associés à un réacteur nucléaire.
« Ces expériences à petite échelle fournissent des données essentielles permettant de comprendre et de caractériser ces technologies. Elles permettront d’éclairer les prochains travaux et d’élargir ces systèmes, de même que d’étudier les avantages potentiels de l’intégration des systèmes de stockage thermique », explique M Pettigrew.
Dans le cadre du projet de stockage d’énergie thermique, l’expérience du scientifique de la sécurité des réacteurs Eric Dening Jia vise à examiner la capacité du sable à stocker de la chaleur de haute qualité, l’expérience du scientifique de la recherche Chukwudi Azih vise à examiner la capacité des sels fondus à stocker de la chaleur de moyenne qualité, et l’expérience de l’analyste en thermohydraulique Ayman Mahmoud vise à examiner la capacité du béton à stocker de la chaleur de basse qualité.
Les trois expériences sont en cours sur leurs propres bancs d’essai, mais l’objectif consiste à les combiner pour voir comment elles interagissent les unes avec les autres, ainsi que de constater comment elles pourraient être mises en relation avec la chaleur produite par un réacteur nucléaire.
Pour en savoir plus sur les trois expériences, regardez les courtes vidéos ci-dessous. Pour en savoir plus sur l’initiative de DIREP, veuillez visiter notre site Web.
L’EXPÉRIENCE SUR LE STOCKAGE DE L’ÉNERGIE THERMIQUE DU SABLE D’ERIC DENING JIA
L’EXPÉRIENCE DE STOCKAGE D’ÉNERGIE THERMIQUE PAR SELS FONDUS DE CHUKWUDI AZIH
L’EXPÉRIENCE DE STOCKAGE D’ÉNERGIE THERMIQUE EN BÉTON D’AYMAN MAHMOUD